Comment réussir ses cuissons à tous les coups

La cuisson mais on devrait dire les cuissons…

La cuisson conditionne toutes les transformations physiques et chimiques du tesson, des émaux et ou des engobes.
Elle donne une pièce céramique dure, résistante et parfois imperméable, voir translucide.

Quelles sont les étapes à suivre:

· Le séchage :

Avant cuisson, LA première étape essentielle est le séchage.

Ce séchage, réalisé à l’abri du vent et du soleil direct, permet d’évacuer la majeure partie de l’eau.

!!! La vitesse de séchage est due principalement, non pas à la température qu’il fait mais à deux facteurs indépendants (ou presque) :

· Le taux d’humidité de l’air.
En effet sous les tropiques avec 90% de taux d’humidité, vos pièces sècheront difficilement voir pas du tout même avec un petit 45°C à l’ombre.

· L’échange gazeux … bref, les courants d’air.
Le renouvèlement de l’air assèchera les pièces rapidement sous un air sec. Ce phénomène peut engendrer des déformations des pièces, voir des fissurations de celle-ci au cas où la pièce ne sècheraient pas uniformément.

Donc attention, si vous posez des pièces fraiches en plein soleil de 13h, l’été bien sec, en plein courant d’air, loin de la mer, vous devrez surveillez tous les ¼ d’heure l’évolution du séchage et bouger vos œuvres pour exposer toutes ses faces uniformément.

Un séchage trop rapide est de toute façon à proscrire.

· Une solution de séchage pour les pressés … Le bassinage :

Si on est en retard pour une commande et/ou qu’il n’arrête pas de pleuvoir depuis des semaines, une solution existe.
Un préchauffage des objets dans un four évacue l’eau superficielle avant la cuisson proprement dite. Cette dernière technique s’appelle le bassinage.

Ce bassinage est une technique qui consiste à mettre les pièces dans un four à une température inferieure à 100°C…
En général on affiche 80°C pendant… le temps qu’il faut pour que les pièces soient sèches à la fin.
Cela peut durer de 3 à 12heures voir plus… (là, on n’est pas écolo !).

Le four en chauffant va créer une dilatation de l’air contenu dans son volume et donc une légère surpression à l’intérieur de celui-ci.

Ce phénomène va évacuer une partie de l’air chauffé et créer une aspiration d’air froid pas les ouvertures du four (évents, fissures, portes, …).

Même en four électrique un échange gazeux se fera entre l’extérieur et l’intérieur du four.

Effets du séchage:

Ce séchage va donc entrainer un début de rétractation de 2 à 8%. Ce phénomène est due à l’évaporation de l’eau qui se transforme en gaz. Ceci entraine un rapprochement des molécules entre elles.

. Comment vérifier qu’une pièce est sèche ?????

Voila, LA bonne question.

On ne va pas démarrer une cuisson, au moindre doute sur l’état de séchage d’une pièce.

Un petit test très simple à faire toujours:

  • C’est simple, poser la pièce crue sur votre joue ou sur l’intérieur du bras. Si vous avez une sensation de froid c’est que la pièce contient encore de l’eau.
    Ce phénomène est dû à l’évaporation de l’eau contenue dans la pièce. C’est comme pour nos réfrigérateurs, cette évaporation crée du froid.

Ne confondez pas avec une pièce stockée dans un atelier sans chauffage en hiver alors que vous sortez d’un lieu bien chauffé.

Entrainez vous avec des pièces que vous venez de fabriquez et d’autres que vous savez sèche depuis des semaines.

· Les cuissons :

Contrairement au séchage, la cuisson est irréversible après 500°C.

Lors de la cuisson des vides vont se créer par le dégazage de l’eau et des éléments carbonés, qui représentent 20% environ du volume de départ (Ca ne crée pas 20% de rétractation !!!!).

La cuisson va permettre de développer des propriétés nouvelles :

  • résistance mécanique
  • porosité faible ou élevée
  • conductivité thermique
  • translucidité parfois

Selon la température maximale atteinte, les transformations de la pâte et les produits obtenus varient (terre cuite, faïence, grès, porcelaine).

Modification de l’argile par la cuisson :

· Les températures :

Lors de l’évolution de la température, des modifications de la structure s’opèrent :

  • jusqu’à 200°C l’eau superficielle s’évacue (pré-chauffage)
  • de 200 à 450 °C, les matières organiques s’oxydent et sont détruites à 700°C
  • de 450°C à 650°C, la structure de matériaux argileux commence à se détruire
  • de 650°C à 800°C s’effectue la décomposition du carbonate de calcium
  • de 800 à 1100°C, il y a « grésage » progressif de l’argile sous l’effet des « fondants »

Evolution de l’eau dans les argiles au cours de l’élévation de la température :

Départ des différentes eaux (à partir de) :

  • Eau d’imbibition : 23°C, lors de façonnage
  • Eau colloïdale : 23 °C, lors du ressuyage de fabrication et du raffermissement (état cuir)
  • Eau d’interposition : 23 à 100°C, lors du séchage et du début de cuisson (passage à l’état de vapeur !!).
  • Eau hygrométrique : jusqu’à 350°C, ressuage de début de cuisson.
  • Eau de constitution de la kaolinite : 450°C

A 550 °C toutes les eaux ont disparues, l’argile ne peut plus être réhydratée !

Evolution des argiles au cours de la cuisson :

  • En cours de séchage : départ de l’eau d’interposition à 100°C passage à l’état de vapeur. Risque d’éclatement des pièces.
  • de 200 à 450 °C, les matières organiques s’oxydent produisant un dégazage. Même risque que ci-dessus.
  • Point Quartz : lors de la montée en température, les cristaux de quartz se disposent d’eux-mêmes dans un ordre différent.
    Aux alentours de 573°C un changement de volume (de l’ordre de 2%) se produit.
    Le quartz Alpha se transforme en quartz Béta. Ce changement est réversible au refroidissement.
    Cette variation de volume peut faire fissurer la pièce si la monté ou la descente en température est trop rapide par rapport aux capacités de l’argile.

Il faut comprendre que ce sont des températures réelles au cœur des pièces.
Il faut en tenir compte si les pièces sont épaisses.

De même si certaines parties de la pièce sont fines par rapport au reste de celle-ci. (Parois fines sur un fond épais, collage de parties plus fines).

Dans ces derniers cas, si la montée est trop rapide, il y a un risque de fissuration à la jonction fin/épais ; la dilatation ne s’effectuant pas simultanément.

Contrôles de la température des cuissons :

  • Le pyromètre : C’est un thermocouple produisant un voltage proportionnel à la température de l’extrémité de la sonde.
  • Montres fusibles (dit aussi cônes) : produit céramique calibré pour s’effondrer à une certaine température en fonction de la vitesse de montée*.

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On trouve encore des anneaux assurant la même fonction.

  • La couleur intérieur du four est une indication précieuse pour qui a un peu l’habitude des cuissons.

* CÔNES PYROMÉTRIQUES de SEGER / Montres fusibles

Tableau d’approximation en °C

Température °C Numéro de cône (ou montre)
600°C 022
650°C 021
670°C 020
690°C 019
710°C 018
730°C 017
750°C 016
790°C 015a
815°C 014a
835°C 013a
855°C 012a
880°C 011a
900°C 010a
920°C 09a
940°C 08a
960°C 07a
980°C 06a
1000°C 05a
1020°C 04a
1040°C 03a
1060°C 02a
1080°C 01a
1100°C 1a
1120°C 2a
1140°C 3a
1160°C 4a
1180°C 5a
1200°C 6a
1230°C 7
1250°C 8
1280°C 9
1300°C 10
1320°C 11
1350°C 12
1380°C 13

 

Les courbes de cuisson :

· Les argiles faïences se cuisent à une température supérieure à la température de cuisson de leur émail.

La raison en est qu’il se produit un dégazage au cours de la cuisson. Ce dégazage s’il n’est pas terminé, risque d’occasionner des défauts dans l’émail lors de la deuxième cuisson. C’est ce que l’on appelle les « trous d’épingle » ou « pin holes » chez nos amis anglophones.

En fonction de votre terre il faudra cuire entre 1020 et 1050°C.

· En grès ou porcelaine, on parle de dégourdi. Celui s’effectue aux alentours de 980°C.

Dans TOUS les cas, quelque soit l’argile utilisée, on ne cuira pas la première fois au-dessus de 1100°C sous peine de ne plus pouvoir émailler ou avec de très grosses difficultés.

On part du principe que l’on enfourne une terre sèche.

Pourquoi devoir varier la vitesse de monté ? :

Plusieurs phénomènes se produisent durant la cuisson :

1. Passage des 100°C : l’eau se transforme en vapeur. Il y a dilatation de l’eau liquide en passage vapeur. Il y aura lieu de laisser le temps à cette vapeur à s’évacuer de la pièce. Risque: explosion de la pièce

2. Dégazage fort entre 250 et 450°C : des éléments contenus dans la terre brulent et se transforme en gaz. Risque : idem qu’en 1

3. Passage des 573°C : Le célèbre point Quartz. Sans entrer dans les détails, c’est la réorganisation de la silice en passant cette température. Cette modification entraine une dilatation de la pièce qui, si elle ne s’effectue pas doucement, entraine une fissuration de celle-ci.

4. Accélération jusqu’à la température voulue.

5. A la redescente, re-passage du point Quartz et rétractation de la pièce. Sans une argile résistante, un refroidissement brutal entrainerait une fissuration de la pièce.

6. Fin de cuisson

– Cuisson d’un biscuit (faïence) :

o Monté à 80-100°C/h jusqu’à 100°C

§ (si le four ne permet pas d’accélérer, on reste à 80-100°C/h jusqu’à 600°C)

o 600°C à 150- 200°C/h

o On monte jusqu’à 1020-1050°C à fond en fonction de la puissance du four.

o Le four refroidi naturellement

(Graphiques donnés à titre d’exemple, temps variables en fonction de votre four).

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Cuisson d’un dégourdi (grès/porcelaine) :

o Tout est identique hormis qu’il est inutile de monter à 1020°C ; 980°C est suffisant.
La deuxième cuisson va monter beaucoup plus haut.
D’autant plus qu’un émail de haute température n’est pas en fusion à 1020°C et n’empêchera pas un dégazage éventuel du tesson.

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– Cuisson d’émail :

o Sur faïence, traditionnellement, on cuit à 980 °C.

Il n’y a que très peu de dégazage ce qui nous permet une première montée plus rapide de l’ordre de 100 à 120°C/h jusqu’au point Quartz de 573°C.

Par mesure de sécurité, nous n’accélèrerons pas la vitesse de cuisson avant 600°C mini pour être sûr que cette température soit atteinte au cœur des pièces. Le risque de fissuration existe encore.

Après le point quartz, « à fond » jusqu’à 980°C. Plus rien à craindre !

Un palier de fin de cuisson (c’est-à-dire que l’on conserve une température constante) durant 10 à 15 minutes est nécessaire afin de laisser le temps à l’émail de bien napper les pièces.

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o Sur grès ou porcelaine c’est identique hormis que l’on continue la montée jusqu’à 1280°C (en cône 9), en tout cas au-delà de 1200°C température de début de vitrification des terres de hautes températures.

Si on cuit en réduction, celle-ci sera démarrée vers 900 – 1000°C.
Avant, l’émail, n’étant qu’une poudre, sera difficilement réduit ; après 1100°C l’émail commencera à rentrer en fusion et deviendra imperméable. Les atomes d’oxygène seront alors plus difficiles à être extrait par la flamme.
La cuisson en oxydation ou en réduction sera développé dans un autre cours.

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